Anna Politkovskaïa, Voyage en Enfer: Journal de Tchétchénie

Lise Carre

Mots-clés

  • Tchétchénie
  • la Russie

Voyage en Enfer d’Anna Politkovskaïa est une compilation de reportages parus dans la Novaïa Gazeta entre fin août 1999 et avril 2000. Dans ces reportages Anna Politkovskaïa raconte et décrit ce qu’il se passe en Tchétchénie.

Ce livre donne une vision plus précise du conflit tchétchène et il permet de faire ressortir les dynamiques de ce conflit. Tout d’abord il permet de comprendre que le conflit russo-tchétchène est un conflit asymétrique qui touche toute la population tchétchène. Il apporte aussi des explications sur les causes de cette seconde guerre telles que le terrorisme et la haine des Russes pour les Tchétchènes qui est réciproque. Il décrit aussi le contexte de ce conflit qui se passe dans la corruption, le mensonge et l’indifférence. Enfin Anna Politkovskaïa fait ressortir les conséquences de ce conflit et donne certaines raisons pour lesquelles il n’y a pas de paix durable possible pour le moment en décrivant la situation actuelle (lors de la fin du livre, en avril 2000).

Ce livre a donc été écrit au début de la deuxième guerre de Tchétchénie. Anna Politkovskaïa décrit dans ses reportages la situation en Tchétchénie. Ces reportages ont pour objets des sujets précis tels que l’évacuation d’une maison de retraite dans Grozny ou la vie dans les camps de réfugiés.

La deuxième guerre de Tchétchénie: un rappel des faits

Cette période correspond à la deuxième guerre de Tchétchénie. Le conflit russo-tchétchène a commencé au début des années 1990. Les Tchétchènes ont déclaré leur indépendance alors que la Russie refusait un démantèlement de son territoire. Des troupes russes sont envoyées en Tchétchénie en 1994. Cette première guerre durera jusqu’en 1996. Les accords de paix de Khassaviourt mettront fin à cette guerre en repoussant la définition du statut politique de la Tchétchénie de cinq ans, c’est-à-dire en le repoussant jusqu’à 2001. Cependant ces accords n’ont pas résolu le conflit et une deuxième guerre éclate en 1999 dont les éléments déclencheurs sont l’invasion de Daghestan par des groupes radicaux tchétchènes et des attentats à Moscou que la Russie attribuera à des Tchétchènes. Cependant depuis la fin de la première guerre, des tensions existent toujours entre les Russes et les Tchétchènes ainsi qu’une volonté de se venger et la haine, ce qui mènera à la deuxième guerre de Tchétchénie. Il n’y a pas de réelle fin à cette deuxième guerre, les Russes ont en effet décrété avoir repris le contrôle de la Tchétchénie en 2000 puis des élections ont été organisées en 2003. Cependant la Tchétchénie n’est pas complètement stabilisée. Il y a toujours des tensions entre les Russes et les Tchétchènes, ainsi qu’un système de peur mis en place par des disparitions et des assassinats ciblés.

Les dynamiques de conflit

Ce livre aide à comprendre les dynamiques du conflit tchétchène. Au travers des reportages on comprend qui s’oppose à qui, pour quelles raisons et de quelle manière. Cette guerre oppose les boïeviki tchétchènes à l’armée russe. Les boïeviki sont considérés comme des terroristes, combattants pour l’indépendance de la Tchétchénie, à l’origine d’attentats ayant eu lieu sur le territoire russe. Leur chef est Chamil Bassaiev. En effet les Russes se sont embarqués dans une lutte contre le terrorisme suite à des attentats attribués aux combattants Tchétchènes à Moscou. Il s’agit d’un conflit asymétrique. Il oppose une armée russe à des groupes terroristes tchétchènes. L’armée est dotée de chars, de transports blindés, d’hélicoptères et de lance roquette (p23, p87) alors qu’en face il ne s’agit que d’une guérilla tchétchène munie de fusils et de kalachnikov.

Ce qui frappe le plus en lisant ce livre, ce sont les attaques envers la population civile tchétchène. En effet aucun des deux camps n’a d’état d’âme pour la population civile. Les russes n’hésitent pas à s’en prendre violemment à des civils. « Lorsque la « lutte contre les terroristes » se répand à travers les villes et les villages, elle devient mortellement dangereuse pour des gens qui n’ont aucun lien, ni de près ni de loin, avec le terrorisme » (p84). L’armée russe veut attraper des terroristes, donc des cibles restreintes, avec des armes de destruction massive (p23). De leur côté, les boïeviki ne font pas non plus en sorte que les civils soient épargnés. Ils considèrent les victimes civiles comme des victimes qu’on ne peut pas éviter quand on est en guerre (p160).

La population civile comme cible

La population civile est réellement une cible de l’armée russe. En effet au travers du livre on comprend que la cible de l’armée n’est pas seulement les boïeviki mais aussi la population civile même si le gouvernement russe ne le reconnait pas. Par exemple, les troupes fédérales ont pris d’assaut le village d’Alkhan-Iourt. Une famille vivant dans ce village a alors décidé de le quitter en voiture. Ils pensaient que les soldats ne s’attaqueraient pas aux habitations mais cela n’a pas été le cas. Cette voiture, avec un mouchoir blanc attaché à l’antenne a été mitraillée par un avion. Avant le deuxième passage de l’avion, une femme Toumich a réussi à faire sortir sa fille et une fille de la voiture. Puis elle s’est couchée sur leurs corps de sorte que le deuxième passage de l’avion ne l’a tuée qu’elle alors que l’avion avait pu se rendre compte qu’il ne s’agissait pas de boïeviki (p85-88). Anna Politkovskaïa s’est rendue sur les lieux quelques jours après et elle n’a trouvé aucune preuve que des boïeviki aient déjà séjourné dans ce village (p88-89). De plus le gouvernement déclare ne pas bombarder les habitations alors que de nombreux témoignages affirment le contraire et de nombreux villages sont complètement détruits. C’est une lutte contre le terrorisme qui fait payer tout un peuple. Toute la population est considérée comme terroriste. Par conséquent le peuple tchétchène subit une punition collective (p120). Une punition qui est toutefois interdit par la constitution russe ainsi que les conventions internationales, qui stipulent qu’une attaque terroriste est un crime concret et donc une opération antiterroriste suppose des actions contre des criminels concrets. Toute punition pour des crimes concrets est catégoriquement interdite (p121-122). Il ne peut donc y avoir de peuple coupable devant répondre des actions de certains de ses représentants.

La « déshumanisation » comme stratégie de guerre

Les Tchétchènes sont considérés comme une race inférieure par la population russe. Ils sont plusieurs fois déshumanisées par des soldats ou des responsables russes. « Ce ne sont pas des gens, ce sont des bêtes » (p141). Ils ne méritent pas la même attention que la population russe, ils ne sont pas aussi importants. Par conséquent ce qui leur arrive n’est pas grave, et on peut les entasser dans des camps de réfugiés sans aucune aide. De plus leurs morts ne sont pas importantes car « les bêtes se reproduisent vite » (p141). Anna Politkovskaïa va jusqu’à parler de génocide comme étant un des objectifs de la guerre (p142). Elle compare les actions russes à celles effectuées par les nazis, les camps de réfugiés aux camps de concentration (p12, p16, p183).

La paradox des camps de réfugés

Anna Politkovskaïa consacre plusieurs chapitres de son livre à décrire la situation précaire des Tchétchènes dans les camps de réfugiés (p64). Les gens s’entassent dans des tentes, il n’y a pas assez de place ; ni assez de nourriture et de médicaments. Cependant les médias ne cessent de dire que l’aide humanitaire arrive dans les camps de réfugiés où la population tchétchène est en bonne santé et vit dans de bonnes conditions. Ce qui n’est évidement pas le cas. Certains responsables de camps ou médecins dans les camps, témoignent qu’ils ont tout ce dont ils ont besoin car ils ont peur de perdre leurs emplois s’ils disent la vérité (p71). « La vérité est que deux cent mille personnes se sont retrouvées dans des conditions déplorables qui ont détruit leur équilibre psychologique » (p151). « Après plusieurs mois de privations, il ne reste plus personne en bonne santé dans ces camps de tentes et de logements de fortune. […] Il n’y a plus d’argent, plus de nourriture, plus d’espoir » (p195). Les réfugiés ont aussi besoin d’être soignée mais il n’y a pas de médicament et il faut payer pour avoir une place à l’hôpital. De plus, certaines personnes chargées de s’occuper des camps font partie du personnel du système pénitentiaire (p33-35). Cela semble assez contradictoire. Les camps de réfugiés ne sont pas sensés être des prisons, mais au contraire accueillir les Tchétchènes fuyant leur pays et leur apporter une aide. La journaliste en vient donc à la conclusion que « la Fédération de Russie prend prétexte de la guerre pour traiter les réfugiés d’une manière extrêmement dure » (p198).

Dans une guerre, les soldats ne gagnent pas

Cependant la journaliste ne décrit pas seulement la population tchétchène, elle ne prend pas partie pour les Tchétchènes et décrit aussi la situation des soldats russes. Dans deux chapitres de son livre elle décrit les problèmes des soldats. Beaucoup souffrent de troubles psychologiques et par conséquent se réfugient dans l’alcool et la drogue. Nombreux sont les témoignages sur les soldats saouls, demandant de la vodka et tirant quand ils en obtiennent pas (p83). Cela montre aussi le malaise qu’il existe parmi les soldats russes.

Dans son livre, la journaliste raconte le conflit, la situation de la population tchétchène et des soldats russes mais elle revient aussi sur certaines causes du conflit.

La guerre nourrie par les sentiment de haine et de revanche

Au travers de son livre, Anna Politkovskaïa explique certaines des causes de la reprise de la guerre. En effet elle décrit la guerre comme un conflit de cinq ans, ce qui prouve qu’il n’y a qu’un conflit avec deux pics de violence. La cause officielle de la deuxième guerre est la lutte contre le terrorisme mais ce n’est pas la seule cause. Il y a aussi une haine réciproque entre Russes et Tchétchènes et la guerre contre le terrorisme est aussi un prétexte pour cacher une revanche des Russes contre les Tchétchène suite à la première guerre.

A plusieurs reprises Anna Politkovskaïa utilise le concept de lutte antiterroriste pour justifier la présence de l’armée fédérale en Tchétchénie. Cependant elle utilise cette expression entre guillemets (p22, p84, p116, p192). Cela montre qu’elle ne pense pas que ça soit la réelle cause, elle ne croit pas à cette raison officielle. Les troupes russes sont entrée en Tchétchénie après l’attaque par des Tchétchènes du Daghestan et des attentas sur le territoire russe qui ont été attribués à des terroristes tchétchènes. Par conséquent ces troupes étaient sensées arrêter ces terroristes. Cependant la journaliste observe au cours de sa présence en Tchétchénie que cette lutte contre le terrorisme permet des actes de violence contre la population tchétchène. Comme nous avons vu, Anna Politkovskaïa n’hésite pas à comparer les actes et les buts de l’armée russe à ceux des nazis.

D’autres causes apparaissent tout au long des descriptions de l’auteur. Elle décrit le désir de revanche des soldats russes et de la haine qu’ils vouent aux Tchétchènes. Comme on l’a vu ils les considèrent comme des « bêtes » dont la mort n’est pas importante. Certains soldats russes veulent aussi se venger après la première guerre de Tchétchénie. Pour les Russes, tous les Tchéchènes sont des bandits, des terroristes ou des criminels. L’auteur décrit la 205e brigade, célèbre pour sa férocité lors des « nettoyages » dont « les membres veulent venger dans l’horreur les victimes de la guerre précédente » (p174). Ils ont vécu la fin de la première guerre comme une défaite et une véritable honte.

Les Tchétchènes éprouvent aussi de la haine envers les Russes. Cette haine augmente au fur et à mesure que les combats continuent et font de nouvelles victimes mais elle existait déjà avant. Elle existe depuis la déportation stalinienne où Staline avait ordonné de faire déporter toute la population Tchétchène, ce qui avait causé la mort d’une grande partie de la population. « Nous n’avons jamais pu oublier et pardonner la déportation ordonnée par Staline, car nous avons un devoir de mémoire » (p21-22). Cependant cela n’est pas un simple devoir de mémoire pour beaucoup de Tchétchènes qui haïssent les Russes.

Au travers des reportages, certaines des causes de la guerre apparaissent comme la haine réciproque entre les deux peuples qui ressort lors de témoignages de soldats russes ou de la population tchétchène. La journaliste remet aussi en question la raison officielle de cette guerre c’est-à-dire la lutte contre le terrorisme. Ce livre permet aussi de comprendre dans quel contexte se passe ce conflit.

Corruption en mensonge occupent une place importante

Le conflit tchétchène est un conflit dans lequel se développent la corruption et le mensonge. C’est aussi un conflit qui se déroule dans l’indifférence.

Un autre élément dénoncé par Anna Politkovskaïa est en effet la corruption. Beaucoup de responsables russes sont corrompus. Un des chapitres concerne les problèmes qu’ont eus Anna Politkovskaïa et ses collègues pour faire évacuer une maison de retraite à Grozny (p52-62). Lors de ce chapitre on apprend que cette maison de retraite était sensée recevoir des financements. Cependant ils ne sont jamais parvenus, ils étaient redistribués à certains membres du gouvernement tchétchène. On débloque aussi des fonds pour les camps de réfugiés, cependant les réfugiés ne bénéficient jamais de cet argent (p65, p101). Cela concerne aussi les soldats. Anna Politkovskaïa interview dans un chapitre des boïeviki qui déclarent acheter leurs armes à des Russes (p147). Les soldats russes sont donc tués par leurs propres armes.

Le mensonge a aussi une place importante dans le conflit. Il y a d’un côté le mensonge envers la population russe et de l’autre le mensonge envers la population tchétchène. Un exemple de ces mensonges est les chiffres officiels de pertes humaines russes. En effet les chiffres de soldats russes morts, donnés par le gouvernement sont allégés par rapport au nombre exact. Par conséquent « rares sont ceux qui continuent à croire les chiffres officiels des blessés et tués » (p107). On ment aussi à la population russe concernant des zones ou des villages « libérés ». Cependant dans les faits des soldats russes continuent à être tués ou blessés dans cette zone (même s’ils sont envoyés loin de cette zone pour être soignés). C’est le cas de Bamout, qui est un village libéré ou pourtant la guerre continue (p112). Les tchétchènes sont poussés à rentrer chez eux car certains territoires de la Tchétchénie sont considérés comme stabilisés. Cependant les soldats russes sont toujours présents dans ces territoires. La Tchétchénie n’est pas stabilisée comme le déclare le gouvernement russe.

En plus de ces mensonges, il y a une censure de la presse. Au cours d’un bref échange entre un soldat et la journaliste, on apprend que « les contacts avec les journalistes sont interdits » (p76). Il y a une manipulation des médias. A la radio on annonce que Znamenskoïe, un camp de réfugié est un paradis et que les fonds du gouvernement coulent à flot. En réalité ce camp est un amas de tentes qui n’accueille aucun réfugié. Cependant peu de journalistes viennent « visiter » le camp sans être accompagné d’une escorte militaire (p93-101).

La journaliste insiste sur l’indifférence de la population russe (p194). A Moscou, les gens continuent de vivre leur vie comme si de rien n’était, croyant les mensonges du gouvernement russe et des médias sur la situation tchétchène. Personne ne s’interroge sur ce qu’il se passe réellement. « Pendant ce temps nous continuons tous à patauger par habitude dans notre folle vie moscovite immorale et banale que nous croyons importante. Les morts lointaines du Caucase n’arrêtent personne à Moscou » (p152).

La journaliste décrit les conditions dans lequel a lieu le conflit mais aussi la situation de la Tchétchénie à la date de clôture de son livre, en avril 2000. A travers ses reportages on comprend certaines des raisons qui expliquent que le conflit continue.

Suite à cette guerre, la haine des Tchétchènes envers les Russes s’est intensifiée. Lors des deux guerres de Tchétchénie des exactions ont été commises par les soldats russes. Des exactions qui n’ont pas été punies. En effet aucun russe n’a été arrêté ou jugé pour avoir tué des civils, piller leur maison ou les avoir menacés (p117). Pour ces raisons, les Tchétchènes ne pourront jamais cohabiter avec les Russes. Surtout qu’Anna Politkovskaïa rappelle que les Tchétchènes et les Russes n’ont pas la même culture. Dans la culture tchétchène, lorsque qu’une personne de leur famille est tuée ils doivent se venger en tuant l’assassin (p116). S’ils ne le font pas ils sont déshonorés. Cela est une raison de plus qui fait que les Tchétchènes et les soldats russes ne pourront jamais cohabiter ensemble.

Les Tchéchènes recueillis dans des camps en Ingouchie sont forcés de retourner en Tchétchénie même s’ils ne le veulent pas (p14-15). Cela pour plusieurs raisons, leurs maisons ont été détruites par les bombardements, ou pillées par les soldats russes ou encore les Tchétchènes refusent de cohabiter avec les soldats russes. Essita Islamova est la mère d’Assia sur qui des soldats ont tiré à un poste de contrôle. Elle se trouvait avec ses enfants dans une voiture et sans aucune raison les soldats ont tiré sur la voiture la traitant de « pute tchétchène ». Essita déclare « Après ce qui s’est passé, comment pourrais-je encore dire que nous faisons partie du même peuple, du peuple de la fédération russe ? Je ne le pourrai pas ! » (p49-51). Une barrière est installée entre le peuple tchétchène et le peuple russe, une barrière qui n’est pas prête de s’affaisser. Après les massacres, les nettoyages et les pillages effectués, les Tchétchènes n’ont qu’une envie se venger, ce qui n’est évidemment pas une solution pour mettre fin à ce conflit. Selon eux, ils « n’[ont] pas le droit d’oublier ça » (p21). A Goragorsk par exemple, la mosquée du village a été détruite avec acharnement. Une nuit les Tchétchènes se sont vengés en décapitant la statue du soldat soviétique vainqueur du nazisme. Sur le monument la phrase « Personne est oubliée » a été effacée, il ne reste que la suite de la formule « Rien n’est oublié » (p91). De plus suite à ses attaques et nettoyages, la situation empire. Les tchétchènes « qui ne voulaient pas combattre vont le faire, maintenant » (p21).

La guerre enlève la perspective du futur

En lisant ce livre, on comprend la situation de la Tchétchénie en 2000 lorsque l’auteur arrête son livre et le publie. La Tchétchénie est un territoire dévasté. Les maisons sont détruites, les champs sont incultivables, en effet ils sont criblés d’éclats d’obus ou imbibés de pétrole (p145). La population tchétchène est désespérée et ne se voit aucun avenir. Les filières mafieuses sont les seuls moyens de gagner un peu d’argent. Anna Politkovskaïa raconte sa rencontre avec un jeune homme tchétchène de vingt-deux ans qui ne se voit aucun avenir. « A quoi ça peut servir, aux gens, d’avoir des voitures sur lesquelles on tirera à nouveau dans trois ou quatre ans ? » (p145). Pour lui le conflit n’est pas prêt de se finir ou alors il recommencera plus tard. Il illustre bien la pensée de la population tchétchène qui pense qu’une nouvelle guerre est inévitable.

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Pour conclure, Anna Politkovskaïa explique le conflit tchétchène. C’est un conflit asymétrique opposant les terroristes tchétchènes à l’armée fédérale mais qui fait de nombreuses victimes civiles tchétchènes. Cette guerre est faite au nom d’une lutte contre le terrorisme qui sert de prétexte à une revanche russe contre les Tchétchènes qui sont deux peuples qui ont une haine l’un envers l’autre. Cette guerre permet de développer encore plus de corruption et de manipulation de la presse en Russie. Enfin la journaliste explique la situation actuelle, le désespoir des tchétchènes que ce soit en Tchétchénie ou dans les camps de réfugiés. C’est une population qui ne voit pas d’avenir et qui désire se venger.

Anna Politkovskaïa explique la situation et le conflit sans prendre partie. Pour cela elle interview tout le monde, des responsables russes et tchétchènes, les réfugiés tchétchènes, des boieviki, et elle tente aussi d’interroger des soldats. Tout au long de son livre elle appelle aux rassemblements des peuples, à la réconciliation entre les Russes et les Tchétchènes. Elle ne souhaite pas prendre partie mais décrire la situation des réfugiés tchétchènes mais aussi des soldats russes, elle veut dire la vérité sur ce qui est caché et sur ce que les médias ne disent pas. En dénonçant ce qui se passe, elle veut que la population prenne conscience des mensonges et de ce qui se passe et qu’elle arrête de croire bêtement ce qu’on lui dit. Elle veut aussi mettre fin à l’indifférence.