La Responsabilité Sociale des Entreprises rendue obligatoire à l’Ile Maurice

Étude de cas sur sa mise en place et évaluation de son impact sur le développement communautaire

Kirsten Koop, Avril 2010

Mots-clés

  • Responsabilité Sociétale des Entreprises
  • gouvernance territoriale
  • développement communautaire
  • participation
  • Ile Maurice

En mai 2009, le gouvernement mauricien a rendu obligatoire la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). Désormais, les firmes oeuvrant sur le territoire mauricien, qu’elles soient étrangères ou locales, doivent dédier 2% de leurs bénéfices annuels au développement communautaire. Une somme considérable sera dégagée dans le futur dans des projets sociaux et environnementaux, dans lesquels le milieu des ONG trouvera toute sa place. Une analyse des positions prises par les trois acteurs impliqués (gouvernement, secteur privé et société civile) montre les difficultés de la mise en place d’un système de gestion de cette RSE obligatoire. En effet, les visions de développement, les positions et ambitions des ces trois acteurs impliqués divergent. Cette étude essaie de cerner les risques et potentiels de la RSE élargie à l’échelle nationale en fonction des attitudes et statuts des différents acteurs.

Introduction

En mai 2009, le gouvernement de l’Ile Maurice, petit Etat insulaire dans l’océan Indien à revenu intermédiaire, a rendu obligatoire la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) sur son territoire.

Désormais, les firmes opérant sur le territoire mauricien sont obligées à investir 2% de leur profit annuel dans le community development, domaine de la RSE assimilable au développement communautaire ou local, voire à « l’ancrage territorial » des entreprises (section 50 du Finance Act du 22 mai 2009).

Bien que la RSE est une pratique de plus en plus fréquente chez les entreprises à l’Ile Maurice, l’organisme principal de représentation des intérêts des entreprises, la Fédération Mauricienne des Employeurs (MEF) s’opposait fortement à cette loi. Elle argumentait que cette obligation est contraire à la définition même de la RSE, qui présente « des initiatives positives et volontaires dans des domaines divers, tel que le domaine social, économique et environnemental, et allant au delà des obligations légales » (The MEF Newsletter, n°12,2009). Malgré son refus initial, le MEF s’engagea rapidement dans des négociations tripartites entre État, secteur privé et la société civile sur les modalités d’implémentation de cette nouvelle loi. En fin de l’année 2009, la plateforme de négociation créée spécifiquement à ces fins, le National Corporate Social Responsability Commitee (NSCRC), publia les lignes directives pour la mise en place instantanée de la RSE obligatoire.

Le montant des investissements futurs dans la RSE obligatoire à l’échelle nationale étant considérable et les firmes ayant la liberté de choisir et de réaliser leurs propres projets, il est indéniable qu’apparaît sur la scène du développement social et environnemental mauricien un nouvel acteur incontournable, officiellement reconnu et mandaté à travers la loi. Quels intérêts poursuivra-t-il ? A quel point et comment modifiera-t-il le rôle de l’État dans le domaine de l’aménagement et du développement? Quelle place aux ONG dans cette nouvelle constellation ? Comment les besoins de la population seront-ils pris en compte? Et, finalement, quel sera l’impact de ce nouveau mode de gouvernance sur le développement?

Cette étude de cas tentera de donner des pistes de réponses à ces questions. Basée sur les résultats d’une étude réalisée par l’auteur à l’Ile Maurice en septembre 2009, elle retrace les intérêts et visions défendus par les différents acteurs dans les négociations tripartites entre juin et octobre 2009.

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